lundi 30 juillet 2007

Partie 2 - Chapitre 9 - Efen iv Iwi

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Et ce fut l’avalanche. De couleurs, de sensations, de saveurs, de simplicité et de complexité, d’amour et de paix. Nous venions de quitter le monde pour atterrir au delà des frontières connues. Pif Paf Pouf. Le tour de magie fonctionnait à merveille. Par delà les brumes et brouillards se cachait un territoire merveilleux et nous l’avions trouvé. Alors que derrière nous la nuit s’étirait, de ce coté ci du monde, le soleil se levait. Nous l’avions vu bousculer la lune qui s’en était aussitôt allée, non sans nous saluer. Et les rayons dorés éclairaient le sublime espace issu de nul part qui s’offrait à nous. J'avais en moi cette impression qu'aucune carte ne répertoriait ce lieu, les papillons l'avaient découvert et s'étaient bien gardés jusqu'à ce jour d'y inviter l'homme. Ainsi tout était resté à l'état sauvage et la nature y était luxuriante. Une terre abondante d’arbres fruités et variés. Un verger exceptionnel qui s'étendait à perte de vue. Et partout des odeurs nouvelles et enivrantes... Le sol était un duvet aux herbes resplendissantes et vigoureuses. C’était comme si nous venions de découvrir la cité des éléphants ou le cimetière de l’Atlantide. J’écarquillai au maximum et me laissai envahir par ce déluge torrentielle de beauté. Mais la petite voix de la raison ne l'entendait pas ainsi. « tu prendras le temps de l’admiration plus tard, concentre toi sur ton objectif premier. » Enterrer l’enfant. je ne réfléchis pas longtemps et optai pour un endroit qui me semblait idéal pour une bonne croissance. Deux arbres - des pommiers je crois - à l'envergure imposante se dressaient non loin de nous. Leurs branches formaient comme une voûte protectrice pour celui qui se tenait dessous. C’est là que je donnai le premier coup de pelle. À quelques mètres en dessous coulait un ruisseau. Il était si étroit qu’aucun poisson n’aurait pu y vivre sans s’esquinter à longueur de journée. Mais son eau était si claire que chacune de ses gorgées avait le pouvoir de revitaliser celui qui la buvait. Et tandis que j'envoyai des coups de pelle dans le sol je discutai avec le garçon. Simplement je tâchai de lui expliquer le pourquoi de mes coups de pelle dans l'espoir qu'il me comprenne.




  • Tu seras bien ici….. En sécurité et c’est bien cela le principal. Je te veillerai constamment et t’aiderai à t’en sortir…… Car oui, mon pote tu sortiras.… de cette terre... punaise qu'est-ce qu'elle est dure à soulever…..T’inquiète pas tu vas pas rester dans ce trou pour toujours. Nan nan, là j’te pose les racines en terre pour que tu te finisses……… Et tu verras c’est vachement mieux quand on peu se servir de ses propres jambes plutôt que de se promener sur une chaise à roulettes…. Hop quand tu seras prêt à marcher on dira basta au trône……. Là tu penses peut-être que j’suis ici pour t’emmerder mais crois moi jamais je ne te ferai souffrir…..Elles sont longues tes racines, il va falloir un trou pas mal profond dis donc…. Car tu es la seule personne qui me reste dorénavant. Et quand tu seras sorti va savoir c’est peut-être bien toi qui agira comme mon ange protecteur…… Tu es déjà un sacré grand bonhomme tu sais…………… Il te va falloir beaucoup de repos et de patience. T’es pas mal abîmé mais ce que tu dois savoir c’est que Dieu a créé les blessures après avoir inventé la guérison alors ne t’inquiètes pas mon pote tu vas y arriver…….


À 60 cm environ je décidai que le trou était d'une profondeur suffisante. Je posai ma pelle contre le tronc du premier pommier qui passa par là. Le soleil brillait déjà haut dans le ciel et le faisait savoir à mon organisme. Mon visage dégoulinait de sueur. Celui de mon pote était complètement inexpressif ce qui m’inquiéta. Je recouvrai mes esprits en respirant profondément et allai m’abreuver quelques instants au ruisselet un peu plus bas. L’eau se fraya un passage timide dans ma gorge pour ensuite se propager dans chaque espace de mon corps qu’elle trouva à requinquer. Les effets se firent rapidement sentir. Tant mieux. Je retournai ensuite près de mon pote, le regardai droit dans les yeux mais il n’était plus là. La vie semblait avoir cédé la place à un coma pas sympa. Je serrai ses mains dans les miennes.


  • Allez mon pote, c’est l’heure du grand saut…..


J’embrassai son corps entier et le soulevai du trône divin pour venir le déposer dans le trou qui l’attendait. Si j’avais eu à imaginer cette scène par le passé je crois que je me serais imaginée complètement affolée par ce destin d’enfant dont j’avais la responsabilité. Je me serais imaginée lui donnant des claques pour essayer de le ramener. Je me serais imaginée lui crier des « reviens ! ! ! ta place est ici ! ! ! allez ! ! ! » Mais au lieu de tout cela j’étais calme, très calme acceptant avec fatalité le sort qui lui réservait la nature. Je souhaitais ardemment qu’il se réveille et j’accomplissais pour cela ce qui me semblait juste mais sans laisser transparaître de trop excessives émotions. Je recouvrai donc avec attention ses racines prenant bien soin de ne les pas brutaliser. Rapidement le petit garçon fut recouvert de terre à hauteur de son bassin. Je formai avec mes mains comme une coupole que je remplis d’eau au ruisseau et versai à plusieurs reprises le contenu transparent sur le visage de l’enfant et sur la terre qui l’abritait. L’eau était si fraîche que j’espérais qu’elle agisse tel un électrochoc et le ramène. Ceci accomplit, épuisée par tous ces efforts, je me laissai choir à ses côtés et fut en moins de temps qu’il ne fallait à un papillon pour battre de l’aile, gagnée par le sommeil.


C'est l'été. La nuit est chaude et moite. C'est peut-être le mois d'août. Je ne suis plus la petite fille Carol-Anne peut-être ne l'ai-je jamais été. Je me sens comprimée, à l'étroit, comme prisonnière. J'ai si chaud et voilà qu'une envie de vomir vient de se manifester. Non pas la gerbe... pas encore. Je prends du recul. Où suis-je? C'est une ville, elle m’est familière. Là je suis rouge. C'est un carrefour. Il est très animé. Je ne vais pas tarder à passer au vert. Et laisser passer les piétons. Et je repasserais ensuite au rouge car c'est là mon métier. Invariablement je signale aux dizaines de piétons qui se tassent devant moi qu’ils peuvent sans crainte traverser la voie publique. C’est un job Il est pas mieux qu'un autre. Pas pire non plus. Il ne nécessite pas de grandes études, juste de la disponibilité et de la rigueur dans l’exécution. Je suis électronique et donc sans état d'âme. Perchée sur mon poteau je ressens depuis le jour mon embauche un fort respect des hommes à mon égard. Bien sûr il en est qui ne tiennent pas compte de mes recommandations mais dans l’ensemble ils me considèrent comme aide précieuse. Cela me ravie d’être ainsi écoutée et pourtant en moi quelque chose gronde. Difficile à décrire, c’est une insatisfaction comme un besoin d’évoluer. J’en ai parler au responsable de l’équipement mais il ne me comprend pas « tu préférerais que l’on te fixe sur un panneau triangulaire devant une école un enfant à la main ? là le moindre mouvement te serais interdit. Alors satisfais toi de ce que l’on t’offre car dehors ils sont nombreux à envier ta place. » Son discours de raison état juste mais n’agissait en rien sur mes désirs. C’est vrai que mon job aurait pu être pire. Au moins à ce carrefour je vois du monde et je bouge régulièrement. droite, gauche, rouge, vert. Oh ce n’est pas à proprement dit une liberté de mouvement mais au moins je ne suis pas comme clouée. Le soir arrive et là c'est l'orage. Oh ce n'est pas une surprise. Toute la journée la pesanteur de l'air était palpable. "Les températures sont supérieures à la normale saisonnière" répétaient inlassablement les passants au pied de mon poteau. Alors la foudre c'était pas un secret tout le monde savait qu’elle allait tomber. Ce soir il n’y a personne dehors. Tous se sont calfeutrer sous les couettes. A l’abri. Moi je bosse et c’est un peu ridicule à dire vrai. Je regarde mon carrefour désespérément vide. Mais l’occasion de se faire la malle est en or. La ville par pan entiers plonge dans l’obscurité. Les éclairs se déchaînent et les pâtés de maisons les uns après les autres font les frais de leur colère. Admirant cette extinction progressive des lumières de la ville je continue sans trop m’en soucier mon rituel. Vert …… rouge ……… vert ……….. rouge …….. vert ………. rouge ……. vert ……….. rouge ………….. vert ……… rouge ………. vert …… rouge …….. vert… Profitant de cet ultime passage au vert je décide de m’éclipser de mon poste, je descend le long de mon poteau et prend la poudre d’escampette. Je ne suis plus un feu de circulation je suis Sonic l'électronique. Peu importe le risque évident d'électrocution je suis enfin libre. Je trouve refuge dans la fissure d’un mur de façade d’un commerce quelconque. Je m’endors ainsi à l’abri de la pluie et je rêvasse de ce monde que je vais découvrir et aimer. Je m’imagine visitant chacun de ses coins les plus reculés. Et partout ce serait la même chose les gens se souviendraient de moi et m’accueilleraient les bras grands ouverts si je leur promettais, en souvenir du temps passé, de faire mon numéro et de passer au rouge. Je me vois déjà comme une saltimbanque vivant de rien ou de si peu. C'est à présent le matin et l'orage a cessé. De beau rayons de lumière égayent la ville. Je quitte donc mon refuge, direction l’aventure. Mes jambes se mettent en action. Et pour la première fois il ne s’agit pas de faire un pas et de virer au rouge. Non là c’est de l’éclate pure. Courir, se laisser envelopper par les vents qui cyclonent autour de mes électrons. Je me faufile à toute vitesse et personne ne me voit. C’est un grand monde fait pour les grands. Et si un môme m'aperçoit il braille dans son vomi « maman , une souris verte ». et cette nunuche qui commence à hurler en plein milieu de la rue d’une voix voisine de celle de la truie que l’on égorge « QUI COURAIT DANS L'HERBE JE L'ATTRAPE PAR LA QUEUE JE LA DONNE A CES MESSIEURS. CES MESSIEURS ME DISENT TREMPEZ LA DANS L'HUILE TREMPEZ LA DANS L'EAU ÇA FERA UN ESCARGOT TOUT CHAUD ». j’ai ainsi tout loisir pour m’évaporer dans le dédale des rues. Et non stop je fonce. A croire que mon corps est bien trop minuscule pour qu’un Dieu y ait pu prévoir de quoi loger de la fatigue physique. A me voir même un petit bâtard croisé mi-nain mi-lilliputien jouerait les Goliath. Là des architectures modernes, ici des monuments prestigieux, plus loin des vestiges hérités des temps passés, tout près des designs urbains tendances. Dans ma vision partiale des choses, force est de constater que nombre d’artistes ont négligé, le socle, la base, le piédestal de leurs créations. La ville c’est bien. Je trace ainsi à bloc pendant ce qui me semble une durée proche de l’année et rien ne semble pouvoir m’arrêter. Et j’accélère toujours, il me reste tant de ruelles à visiter. Malheureusement il suffit parfois d’une unique feuille de journal sur votre passage pour glisser déraper et se rétamer. Bing boum aïe. Même pas mal devrais-je dire. Car je le sens je suis indolore. Et pourtant rapidement l’angoisse me gagne. Car en première page du journal c’est un portrait robot de moi, petite personne verte, qui figure, avec en légende et en gros caractère « WANTED ». Pliant la page en dix je m’enfuis à la recherche d’un endroit calme pour la lire attentivement. C’est dans un parc entre deux herbes rescapées d’une tondeuse municipale destructrice que je m’assoie complètement bouleversée.


« Hier soir peu avant 19h au carrefour H…..tandis que deux frères, E… et I… âgés respectivement de 4 et 8 ans traversaient la voie en empruntant le passage piéton une voiture est venue les percuter avec violence. On estime la vitesse du véhicule au moment de l’impact à près de 65 km/h. Le chauffeur du véhicule à, sans porter secours à ses victimes, prit la fuite. Bien que les parents inquiets ont informé rapidement la police c'est seulement ce matin que le tragique événement à été rendu public. C’est dans un magasin de vêtements voisin des lieux du drame, que le plus jeune des enfants a été retrouvé. B……, un jeune satanique se rendant à sa chorale dominicale aux catacombes s’est soudain arrêté au dit commerce séduit par un singulier vêtement. Il est alors entré et a immédiatement demandé à la vendeuse « Auriez vous le même maillot maculé de sang en taille XL. » Perplexe la jeune vendeuse qui effectue là son premier stage dans le milieu et qui à coup sûr en gardera un souvenir mitigé s’est précipitée à la vitrine et à soudain découvert l’horreur. Le mannequin vautré à terre n’avait rien à faire là et pour cause il s’agissait du plus jeune des enfants. Mort. L’enquête de police qui n’en est qu’à ses prémices à tout d’abord mis en cause l’attitude soupçonnée du grand frère qui pour braver un interdit parental bien connu aurait forcé son jeune frère à traverser alors que le feu était au rouge. Devant le tollé médiatique annoncé de cette thèse et sur l’insistance des parents, des notables fort connu de la région mais qui pour l’occasion souhaitent garder l’anonymat, la police qui s’apprêtait sur conclusion d’experts à dévoiler le stratagème des deux garnements, stratagème prouvant que les deux enfants auraient prémédité leur coup et choisi de dérober le magasin de vêtements après divers calculs portant sur le poids de l’enfant, de l’impact du choc présumé de cet enfant avec un objet donné (en l’espèce un véhicule lancé) et dont la résultante était le point de chute (ici la vitrine d’honnêtes et travailleurs commerçants de notre jolie cité), à pour le moment remis à plus tard ses déclarations fracassantes. Respect du chagrin des parents. Cependant un élément nouveau explique la position de notre police. En effet il s’avère que depuis plusieurs jours le feu qui officiait au passage piéton du carrefour H….. aurait déserté son poste. En cette période sombre chez les travailleurs de petite taille c’est l’incompréhension et l’indignation. Le secrétaire du chef de la police nous fait savoir que dans une future allocution que donnera son patron il sera dit « Nous invitons le malheureux chauffard à dévoiler son identité Tout d’abord présenté comme un dangereux criminel et qui plus est fuyard il est aujourd’hui innocenté. Mieux il est un probablement un héros. Les deux enfants criminels avaient supputés qu’avec un impact à 50km/h vitesse maximale autorisée en centre ville, ils auraient sans trop souffrir pénétré dans le magasin de vêtements pour le cambrioler. En accélérant volontairement, le pilote à non seulement déjoué les plans des deux malfrats mais aussi fait preuve d’un grand sens de la justice. » Pour conclure la police invite tout le monde à une vigilance accrue. La tête pensante des frères criminels en herbes n’étant toujours pas retrouvée il est possible qu’elle ne soit pas retombée pour l’instant en raison de la violence du choc avec la voiture. La police suggère donc de garder la tête haute, car la capture de cet enfant de huit ans sera bien évidemment récompensée. Par ailleurs la police suggère également à ses concitoyens de garder la tête basse. En effet les soupçons se portent également sur le feu vert (ou rouge, c’est selon) dont la disparition demeure récente. Il pourrait s’agir d’un complice. Aussi toute personne de petite taille, c’est à dire d’environ dix centimètres, et peu importe sa couleur doit être signalée aux autorités. Là encore une récompense est prévue. »


Je suis en larmes. Là je ne suis plus un feu, je ne suis plus Sonic, je suis une serpillière. Ainsi, c’est moi que l’on accuse. Moi la jeune un peu fofolle qui avec innocence souhaitait juste découvrir le monde. Mais l’innocence ne fait pas de cadeau. En espérant qu’elle pardonne. Oh bien sur je sais que je ne suis pas la complice d’un cambriolage farfelu mais si deux innocents enfants sont morts c’est parce que j’ai quitté mon job pour mon plaisir. Sans même veiller à me faire remplacer. Tu cherchais une raison, un but à ton travail monotone. Et bien te le voilà livré sur un lit funéraire. Ta présence et ton sérieux sauvent des vies humaines. Ton absence les enlèvent, voire les projettent contres de vitrines 14 mm. Bing ça fait mal. Je suis à ce point honteuse qu’il me faut déjà fuir ce monde que je n’ai pas encore découvert. Cet univers qui rend les grands cinglés me rejette sans m’avoir donné la possibilité de le visiter. Alors je trace. L’urgence qui me fait détaler ignore les risques de me faire voir par une populace lectrice de feuille de chou accusatrice à mon égard. Et alors. De toute manière, pour moi, que ce soit au fond d’une geôle, d’une grotte, d’un abri de fortune, c’est l’obscurité qui m’attend. je suis une pile électrique qui fonce tête basse. Chaque bruit suspect de la ville me fait retenir ma respiration tant je sens ma dernière heure venue. Les clébards sentent la peur et ce n’est pas mon épaisse transpiration qui les trompera. Je grésille. Ainsi recouverte de ce jus d’aisselle olfactivement regrettable je suis telle un dommage électrique en sursis. Et tout s’accélère. Autour de moi je ne distingue plus rien si ce n’est un curieux brouhaha incessant qui s’abat sur moi. Je devine des enfants qui distinguant ma lumière verte pointent un doigt tendu en ma direction en hurlant à qui mieux mieux. Je perds le contrôle de mon corps et la cadence infernale me procure une sensation d’ivresse euphorique insoupçonnée jusqu’alors. Je suis une comète qui vole à altitude ras du bitume. Je suis descendue de l’espace pour visiter vos contrées avec la vitesse du grand v la furie du grand f et l’urgence du grand u. Je suis l’inusable l’infatigable l’ingérable astéroïde sorti de son poteau. Le coming out d’un feu follet qui follait. Illucide je suis envahie. Scarification par la haine qui s’abat sur moi. Tous unis contre les petits. Ma vitesse de croisière ne cesse de grimper et derrière moi une traînée de feu qui crame les museaux des enfants et animaux qui osent m’approcher de près. Plus vite plus vite petit feu de circulation fait toi péter l’ampoule. L’homme est une maladie qui se caractérise par un absence totale de respect et une abondante écume à la sortie de sa gueule. Mais il peut bien continuer à me traquer. Je suis issue de la technologie DEL pour diode électro luminescente. Alors soit en certain tu ne m’useras pas. Je peux vivre jusqu’à 100 000 heures. Tu te les représentes mal, ce n’est pourtant pas compliqué. Je suis 4166 jours, 138 mois, 11 années. Et si comme toi je me contente de fonctionner 10 heures par jours alors je tiendrai 10000 jours, 333 mois, 27 ans. Et je m’éteindrai invaincue à l’âge des rock-star. Alors en attendant cet âge je vais t’échapper à la vitesse de la lumière et trouver un coin paisible pour passer en mode économique. Et j’accentue ma déferlante. En une micro seconde je rejoins les quartiers donnés aux pauvres pour qu’ils y crèvent. Les tours sont hautes pour rappeler à ces pauvres qu’ils vont pas tarder à côtoyer le divin ou le malin et elles sont austères pour bien marquer le côté cimetière vertical. Je commence alors à tournoyer autour d’une de ces grosses structures. Je m’élève telle une boule de feu piquée à vif et m’en vais fracasser avec énergie l’une des vitres proche du sommet. Je dévale ensuite l’escalier et je sais enfin ce que je cherche. Mon repos se trouve au rez-de-chaussée. Je sais j’aurai pu passer par le hall d’entrée mais y’avait un digicode. Elles sont bien là par dizaines réunies en bas. Chacun de ces carré porte le nom de son propriétaire. Je soulève une trappe au hasard m’engouffre dans la boite aux lettres au confort sobre et passe en veille pour le restant de la nuit. Une porte qui s’ouvre, un brin d’air frais qui s’immisce accompagné d’un doucereux rayon de soleil, ma trappe se soulève et deux gros yeux qui me regardent. J’hurle……….


Et me réveillai transie de peur. Cauchemar urbain. Paniquée j’eus bien du mal à savoir où j’étais. Je n’avais pourtant pas bougé. De ce verger accueillant. De cette terre amicale qui portait en elle la croissance de mon protégé. Quand je me réveillai lui avait déjà ouvert les yeux. J’étais comme déçue de ne pas avoir assisté à ce moment magique. Un court instant je vécu cela comme une trahison et puis tant pis. La douleur qui marquait son visage semblait s’être dissipée. Remplacée par une vierge expression. Que c’était beau. Il me regarda avec timidité et moi je me sentis faible. Sa croissance n’avait de cesse et bientôt ce serait à lui de me protéger. Sa mine devint radieuse lorsque ses mains au contact des hautes brindilles s'amusèrent et dessinèrent de larges cercles aux contours imparfaits. L’éveil du nourrisson ne s’accompagne pas toujours de pleurs. C’était comme s’il se la jouait sage parmi les sages. Une paix intérieure visible de l’extérieur. Je n’osais l’approcher. Son regard était libre, refusant de s’accrocher à la moindre image, il se promenait sur les couleurs qui se découvraient à lui. J’étais là mais pas plus présente que les pommiers, les fleurs ou encore les papillons. Je gardais mes distances et bientôt sentis toute la fatigue du monde se réunir sur mes épaules. Cette fatigue qui n’avait cessé d’appuyer de plus en plus fort. Je ne pouvais être aux côtés de l’enfant. Et à nouveau je me laissai happer par le trou noir qui susurrait mon nom « Carol Anne, Carol Anne, rejoins-moi… ».









... to be continued

la suite sera en ligne mercredi 8 août


1 commentaire:

Anonyme a dit…

Well written article.